De la trace à l’empreinte ou l’équivoque d’un indice, un œil scrute le réel. Entre Didier Jordan et le réel, une chambre obscure imprimant sur le vif, sans délai, une fraction d’univers.
Comme une immense pupille dilatée qui engloutirait tout, jusqu’au moindre détail, simultanément le près et le lointain.
L’espace se contracte, la lumière fluidifiée ou stratifiée s’inscrit sur le support, captive, telle une griffure heurtant la surface du papier. Elle devient l’écriture de l’image, l’indice à décrypter.
Le temps suspendu confond cours d’eau et ondulations des blés. L’eau semble devenir matière résistante, fourrure. Le regard suit le mouvement continu et s’engouffre dans l’ombre d’un détail. S’ouvre un espace tactile (aux allusions picturales) qui absorbe le spectateur dans une atmosphère d’étrange familiarité.
Fascinantes par leurs richesses, leurs diversités et leurs sensualités, les «Murales» de Didier Jordan sont issues des murs de villes mexicaines. Peintures collectives involontaires construites par couches successives. Sur ces surfaces soumises à l’épreuve du hasard et du temps, se mélangent des couleurs, des matières, des inscriptions. D’une fraction de seconde en fraction de réalité, le travail de Didier Jordan bascule dans cet interstice, cette fine lame entre le réel et son empreinte et ouvre dans ce nouvel espace la durée d’une vision.